Un rapport du Sénat appelle à suspendre la réforme du corps diplomatique
Par Le Figaro avec AFP
Publié le 19/07/2022 à 14:58, mis à jour le 19/07/2022 à 15:22
Un rapport du Sénat préconise de suspendre la réforme du corps diplomatique. laurencesoulez / stock.adobe.com
La réforme du corps diplomatique, à l'origine d'une grève rarissime au Quai d'Orsay début juin, risque en l'état d'affaiblir le rayonnement de la France à l'international et doit être suspendue le temps de lui adjoindre, a minima, des garde-fous, préconise un rapport du Sénat présenté mardi 19 juillet.
«Cette réforme n'apporte aucune amélioration, bien au contraire, au statut et à l'efficacité de nos diplomates», a déclaré Christian Cambon, président (LR) de la commission des Affaires étrangères du Sénat lors d'une conférence de presse à Paris. «C'est une affaire assez grave à un moment où plus que jamais nous avons besoin de renforcer notre diplomatie et (...) où nous avons besoin de diplomates aguerris et compétents», a-t-il ajouté, citant notamment le cas le dossier du nucléaire iranien ou les offensives diplomatiques de Pékin et de Moscou.
«Mise en extinction»
Voulue par Emmanuel Macron, la réforme de la haute fonction publique crée un nouveau corps d'administrateurs de l'État et prévoit que les hauts fonctionnaires ne soient plus rattachés à une administration spécifique mais soient, au contraire, invités à en changer régulièrement tout au long de leur carrière. Pour les quelque 700 diplomates directement concernés par la réforme, cela se traduit par une fusion puis une «mise en extinction» progressive d'ici à 2023 des deux corps historiques de la diplomatie française, ministres plénipotentiaires (ambassadeurs) et conseillers des Affaires étrangères.
À VOIR AUSSI - Reportage : près de 200 diplomates rassemblés devant le Quai d'Orsay contre la suppression des corps diplomatiques
En clair, ces deux corps pourront désormais être pourvus par des administrateurs de l'État - et non plus pour une grosse partie d'entre eux par des diplomates de formation - une évolution qui fait notamment craindre à ses détracteurs une perte d'expertise sur le terrain et en négociation et à terme une crise des vocations.
«Suspendre» l'application de la réforme
L'application de la réforme «fragilise l'appareil diplomatique français et affaiblira le rayonnement de la France qui tient son rang de puissance du Conseil de sécurité des Nations unies de l'excellence de ses personnels diplomatiques plus que de ses performances économiques ou militaires», épinglent dans le rapport les sénateurs Jean-Pierre Grand (Les Indépendants - République et Territoires) et André Vallini(Socialiste, Écologiste et Républicain).
Face à ce constat, la commission du Sénat appelle à «suspendre» l'application de la réforme, à «prendre le temps d'ouvrir un dialogue approfondi avec les personnels» et à mettre en œuvre huit de ses préconisations conçues comme des garde-fous. Le rapport recommande notamment de poser comme condition pour devenir chef de mission diplomatique «d'avoir exercé pendant au moins trois ans des fonctions de numéro deux de mission diplomatique» - une exception pour 20% des postes d'ambassadeurs pourrait toutefois être prévue.
À LIRE AUSSILa suppression du corps diplomatique entérinée sous une pluie de critiques
Il préconise également la mise en place d'un droit de regard - sous la forme d'un avis public - des commissions «permanentes compétentes» du Parlement sur la nomination d'ambassadeurs au sein de grandes enceintes internationales, comme le G20. Le 2 juin, plusieurs dizaines de diplomates, soutenus sur Twitter par des ambassadeurs chevronnés, s'étaient rassemblés devant le Quai d'Orsay à Paris pour exprimer leur «fatigue» et leur colère face au «manque de considération» contenu selon eux dans la réforme.
À VOIR AUSSI - Diplomates en grève: ce que révèle le mouvement
21 commentaires
- Chorebe
le 19/07/2022 à 16:28
Le Sénat est très bien inspiré de se saisir de l’affaire. La décision prise à l’Elysée pour s’attirer les bonnes grâces de la haute administration en permettant à chaque haut fonctionnaire d’espérer un jour être ambassadeur et de percevoir ainsi les indemnités de résidence attachées à la fonction diplomatique, était particulièrement redoutable. Le Quai d’Orsay est la seule administration où l’on parle vraiment des langues étrangères, bien que certains énarques ne brillent vraiment pas dans ce domaine. Croit-on vraiment que tout administrateur de ministère technique pourra faire ses discours et ses interviews en langues étrangères, et même en anglais? Et quid de la négociation? C’est un métier qui ne s’invente pas.
- gerard38lf
le 19/07/2022 à 16:28
Les senateurs ont bloqué le vote des femmes de 1920 a 1945
C’est dire si ce sont des fanatiques de la reforme
Snif
- anonyme
le 19/07/2022 à 16:16
Il y a toujours eu une part de hasard dans le choix des diplomates recrutés par l’ENA puisque c’est le rang de sortie qui déterminait si vous alliez au Quai d’Orsay ou à la sécurité sociale