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domingo, 14 de dezembro de 2025

O filósofo francês Pascal Bruckner recebe o prêmio da Laicidade: discurso ao receber o Prêmio (Le Point)

 O filósofo francês Pascal Bruckner recebe o prêmio da Laicidade. Ver abaixo o seu discurso ao receber o Prêmio

Pascal Bruckner : « La France est détestée non parce qu’elle opprime les musulmans, mais parce qu’elle les libère »
Le philosophe, romancier et essayiste français de 76 ans remet ce mardi soir à l’Hôtel de Ville de Paris le 19e prix de la laïcité. Voici son discours.

PRA:  Recomendo ouvir seu discurso falado, pois tem pequenas diferenças com o que vai aqui reproduzido.

Par Pascal Bruckner
Le Point, 09/12/2025 à 18h00
https://www.lepoint.fr/societe/pascal-bruckner-la-france-est-detestee-non-parce-qu-elle-opprime-les-musulmans-mais-parce-qu-elle-les-libere-09-12-2025-2605083_23.php


Je voudrais ici inverser l'ordre des discours : non pas m'alarmer des atteintes à la laïcité mais me demander pourquoi la France fait l'objet d'une telle hostilité de la part des fondamentalistes et des bigots de tous les pays, y compris du nôtre. La rage contre Paris vient de la séduction qu'exerce notre modèle sur de nombreux croyants. Quand la République, après des siècles de combats d'une violence inouïe contre l'Église, aboutit à la loi de 1905, elle ne se déleste pas seulement du poids écrasant que le catholicisme exerçait sur l'école et la pensée, elle construit un rapport à la religion qui va séduire de nombreux dirigeants.
Dont Kemal Atatürk qui, à Ankara, dès 1924, va imposer une laïcité d'État à une population qu'il juge abrutie par des siècles d'endoctrinement coranique. En quoi le président Recep Tayyip Erdogan, lorsqu'il pointe un doigt accusateur contre nous, trahit aussi l'héritage du fondateur de la Turquie moderne. Le pacte français est simple : l'État est neutre, aucune religion ne dicte la décision politique, la foi doit s'exprimer de façon discrète dans l'espace public, ce sont la loi et les mœurs qui régissent la conduite des individus dans leurs interactions.
Sur ce plan, la France se traduit par la visibilité du féminin, comme le notait la romancière américaine Edith Warton, dès 1918, admirative de la façon dont les femmes avaient à l'arrière, durant le premier conflit mondial, sauvé la nation quand les hommes étaient au front. Le goût de la conversation entre les sexes, la persistance des rapports de séduction, la coquetterie des passantes dans les rues, voilà ce qui irrite, entre autres, les barbus. Edith Warton serait stupéfaite, aujourd'hui, de voir tant de nos jeunes filles attifées en bonnes sœurs, noyées sous les abayas et les burkinis au nom de Dieu.
Champ de bataille
La laïcité à la française, devenue un champ de bataille d'interprétations opposées, organise la coexistence pacifique entre les cultes mais permet aussi de s'en affranchir. Elle prévient la persécution des fois par l'État mais aussi la persécution des consciences par une religion d'État. Grande différence d'avec le monde anglo-saxon : elle protège les religions, elle nous protège des religions. La loi républicaine est au-dessus de la loi divine, car elle organise l'égalité de tous les citoyens.
Affolement des fondamentalistes : la France est détestée non parce qu'elle opprime les musulmans mais parce qu'elle les libère. Elle offre à chaque croyant la possibilité de vivre sa foi mais aussi d'en changer, voire de l'abandonner ou de se convertir à une autre. L'indifférence en matière de religion devient une option offerte à chacun : terrible perspective pour qui veut imposer rites et ablutions, jour et nuit, de la naissance à la mort.
La protection des minorités est aussi le droit pour chacun de leurs membres de s'en retirer sans dommages, par l'éloignement ou l'oubli, de se forger un destin propre, d'exister à titre de personne privée qui ne se déduit pas de ses racines. C'est la grande différence d'avec le multiculturalisme nord-américain qui rive chacun à sa couleur de peau, à ses origines. La laïcité est aussi le droit, sur le plan religieux, de délaisser la foi de ses parents, voire d'en embrasser une autre. Le chantage à la solidarité ethnique, raciale, religieuse, à la fidélité à l'oumma servent de rappel à l'ordre pour les déserteurs éventuels et bride leur aspiration à la liberté.
N'en déplaise aux bigots du Washington Post, de Fox News, du New York Times, wokistes de gauche ou de droite, toujours prompts à nous faire la leçon, on ne voit pas d'exil massif des musulmans de France vers le Maghreb ou le Machrek. Au contraire. Ils savent que chez nous ils auront la possibilité de se sentir français avant d'être catholiques, athées ou musulmans et pourront reléguer leur croyance à la vie familiale ou dans leur for intérieur, voire la suspendre.
À ce propos, pour tous ceux qui adhèrent encore à la fable et à la farce d'une Amérique terre d'élection de la liberté d'expression, rappelons que pas un journal outre-Atlantique n'a publié les caricatures de Charlie Hebdo. Ils ont vomi sur Charlie même après l'attentat. Les nazis ont le droit de défiler, toutes bannières déployées comme bon leur semble, mais la satire religieuse est bannie. Et depuis que l'administration Trump a ouvert un « bureau de la foi » dans l'enceinte de la Maison-Blanche, les choses ne vont pas s'arranger.
L'islam politique est assiégé
On décrit parfois l'Hexagone comme une forteresse assiégée en proie à un adversaire implacable. On peut renverser la proposition avec autant de pertinence : derrière les vociférations de ses adeptes, l'islam politique est lui aussi assiégé. Nous sommes plus forts que nous le croyons, les fous de Dieu plus faibles qu'ils ne le pensent, car nous les avons déjà gangrenés de l'intérieur. Nous occupons leurs cerveaux, nous hantons leurs âmes et c'est ce qui les enrage. Ne minimisons pas l'extraordinaire séduction qu'exerce encore le mode de vie occidental et spécialement français, contrepartie de l'aversion que d'autres lui vouent.
Combien dans le monde musulman sont aussi gagnés par l'impatience de la liberté, un style de vie qui conjoint l'amour de l'existence et l'accomplissement individuel ? Ce dont ils veulent être libérés, ce n'est pas tant de la foi que du cléricalisme, de la superstition, de la bêtise. Religion et spiritualité sont loin d'être synonymes, on peut être un fidèle mécanique qui répète les mêmes incantations sans les comprendre et suit les observances de ses ancêtres. C'est pourquoi nous ne pouvons pas reculer sur nos principes, prôner, comme beaucoup le recommandent, surtout à gauche, un apaisement qui serait l'autre nom du renoncement. La laïcité ne fonctionne que si toutes les parties en présence jouent le jeu.
Qu'une seule confession se cabre et se dise persécutée et toute la mécanique s'enraye et dégénère en débats byzantins. Notons pour le déplorer combien la gauche, si prompte à bouffer du curé et à dénoncer l'extrême droite, peine à prononcer le mot d'islamisme, redoutant plus que tout de stigmatiser une « minorité opprimée ». Et saluons, avec tristesse, la performance du leader Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, qui a réussi devant une commission d'enquête parlementaire, ignorante ou passive, à revendiquer pour sa seule formation tout le catéchisme laïque, lutte contre l'antisémitisme compris. Plus le mensonge est gros, plus il passe.
Il faudra un jour tordre le cou à cette rengaine ânonnée depuis plus d'un siècle selon laquelle nous vivrions en Europe dans un désert spirituel. Y a-t-il un seul continent où les citoyens disposent d'autant d'outils culturels, opéras, théâtres, librairies, bibliothèques, cinémas, où le souci philosophique, l'interrogation sur les fins dernières, est plus développé que chez nous ? La France accorde à ses concitoyens, musulmans, juifs, bouddhistes, agnostiques ou chrétiens, fatigués des incantations, des rituels, la chance unique d'être allégés du fardeau céleste.
Dieu est fatigué
À titre personnel, je n'ai rien contre le prosélytisme religieux s'il s'avance comme une proposition offerte à tous et non comme l'imposition d'un message à prendre ou à laisser, sous peine d'égorgements. La croyance est aussi un marché dont les grandes confessions tentent de prendre une part grandissante : voyez la concurrence entre évangéliques et catholiques romains en Afrique et en Amérique latine. À condition que la prédication emprunte la voie de la persuasion et non celle de la terreur. Toute grande religion est digne de respect dès lors qu'elle est capable de se modifier, comme l'a fait l'Église romaine lors de Vatican II entre 1962 et 1965, de se transformer sans se renier.
Mais Dieu lui-même est sans doute lassé d'être invoqué en permanence par des hommes et des femmes qui bafouent son message, le compromettent avec des passions trop humaines. Quelle présomption de croire qu'on peut insulter Dieu, le blesser ou pire encore prétendre qu'on va le venger, nettoyer dans le sang la souillure du blasphémateur. Qu'on l'adore ou qu'on l'ignore, il demeure, si toutefois il existe, hors de notre atteinte.
L'écrivain américain Saul Bellow, commentant la fameuse expression allemande « Glucklich wie Gott in Frankreich » (Heureux comme Dieu en France), expliquait dans le New York Times du 13 mars 1983 : « Dieu serait parfaitement heureux en France parce qu'il ne serait pas dérangé par les prières, rites, bénédictions et demande d'interprétation de délicates questions diététiques. Environné d'incroyants, Lui aussi pourrait se détendre le soir venu, comme des milliers de Parisiens dans leur café préféré. Peu de choses sont plus agréables, plus civilisées qu'une terrasse tranquille au crépuscule. »
Ce que Paris et plus généralement la France offrent aux étrangers, c'est la possibilité de bien vivre dans le silence ou la discrétion du Divin.
Je ne sais pas si Dieu est grand.
Je pense qu'il est surtout fatigué.

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