Hoje, sexta-feira 16 de setembro, concedi uma entrevista telefônica à Radio France Culture, uma das emissoras do sistema nacional francês de rádio, para ser transmitida proximamente no quadro da emissão diária “Les Enjeux internationaux”. Como o jornalista Thierry Garcin tinha enviado previamente algumas questões para orientar o debate, eu tive o cuidado de preparar, desde o dia 7/09/2011, algumas notas para apoiar minha fala. Entretando, no curso da gravação, discorri livremente sobre os temas, falando o que me vinha à mente.
Quando o programa for radio-difundido, dentro de uma semana, aproximadamente, informarei as coordenadas para sintonizar.
Radiodiffusée le 29/09/2011
(link: http://www.franceculture.com/emission-les-enjeux-internationaux-bresil-les-ressorts-d%E2%80%99une-economie-emergee-apres-trois-ans-de-cri).
Abaixo transcrevo minhas notas de apoio.
Paulo Roberto de
Almeida
interview à la Radio
France Culture,
journaliste Thierry
Garcin, pour l'émission
quotidienne
1) Quelles méthodes
adoptées pour affronter les conséquences de la crise surgie en 2007-2008 ?
Le président Lula a
d’abord essayé d’ignorer la crise, en disant qu’il ne s’agissait que d’une
petite vague, incapable de provoquer de grandes secousses au Brésil. Tout de
suite après, avec une chute remarquable de la production industrielle et la
plongée des prix de matières premières exportées par le Brésil, le gouvernement
s’est finalement réveillé et a commencé à adopter des mesures classiques de
style keynésien. La Banque Centrale a réduit les taux d’intérêt tout comme les
réserves obligatoires des banques (au Brésil à des niveaux anormalement élevés,
de 45% des dépôts à vue). Le ministère des finances, de son côté, a réduit
certains impôts – mais seulement les impôts fédéraux, ceux qui sont répartis
avec les états et municipalités, pas les contributions qui sont détenues
exclusivement par le Exécutif fédéral – et a permis beaucoup d’opérations de
crédits par les banques d’État (Banque Nationale de Développement, Banco do
Brasil et Caixa Econômica Federal), qui sont responsables d’une part
considérable du marché financier.
Des allégements
spéciaux ont été concédés à des secteurs privilégiés par Lula, comme
l’industrie automobile, et du même coup son cher ancien syndicat des métallurgistes.
Le raisonnement était classiquement keynésien : maintenir le niveau de la
demande et de l’emploi. Sauf que beaucoup d’autres mesures n’étaient pas
exactement anticycliques, comme l’augmentation des salaires des fonctionnaires d’État
– qui provoquent des effets durables dans les dépenses publiques – ou la
correction du salaire minimum au-dessus de l’inflation, ainsi que l’offre
généreuse des crédits consignés, tous provoquant une augmentation exagérée de
la demande, en suscitant donc des pressions inflationnistes.
Tout de même, la
croissance est chuté a zéro en 2009, avant de rebondir a 7,5% en 2010 ;
dans la moyenne, la croissance pendant les années Lula n’a pas dépassé, en
moyenne, 4%, fruit d’un taux d’investissement inférieur à 20%, ce qui est le résultat
d’un taux d’épargne très médiocre, entre 17 e 18% seulement, étant donné le
très haut niveau de la charge fiscale au Brésil, à prés de 35% du PIB,
équivalent à celle de l’OCDE (dont les pays, pourtant, exhibent un revenu par
tête qui est cinq ou six fois supérieur au revenu moyen des Brésiliens).
2) L’état des lieux
économique.
Le Brésil, en dépit
de taux de croissance relativement modestes par rapport aux pays dynamiques
d’Asie, a été énormément bénéficié par la croissance globale entre 2002 et 2008,
compte tenu surtout de son insertion dans les circuits internationaux d’offre
de produits de base, dont il continue à être, encore et toujours, un très grand
exportateur. Il a aussi profité de l’exceptionnelle croissance chinoise, pays
qui est devenu son premier partenaire commercial, devançant les États Unis dès
2009 – ainsi que d’autres pays
émergeants qui ont pris de l’importance dans ses relations commerciales
extérieures.
Certains économistes
calculent la demande externe comme étant responsable pour au moins un tiers de
la croissance brésilienne – les autres sources étant l’expansion du crédit
interne à la consommation, ainsi que les investissements et les achats
gouvernementaux, y compris les entreprises d’État, comme Petrobras, aujourd’hui
une des cinq premières dans l’exploitation pétrolifère. Il est vrai que
l’augmentation des exportations est due beaucoup plus à la hausse de prix des
produits – donc la valeur – qu’à l’expansion des volumes, compte tenu de la
valorisation significative de la plupart des commodities exportées par le Brésil, qui ont atteint des prix
records entre 2003 et 2008 (surtout les produits alimentaires, dont le Brésil
est un champion mondial).
En effet, beaucoup
d’économistes au Brésil – et même certains observateurs étrangers – commencent
à parler de la « réprimarisation » de l’économie brésilienne, étant
donné l’importance accrue des exportations de produits de base, ainsi que d’une
« désindustrialisation », vue la diminution de la part de l’industrie
dans la formation de la valeur ajoutée. Il s’agit, en fait, d’un phénomène
complexe, qui combine des facteurs positifs – soit, la grande demande
internationale pour des produits dont le Brésil est exceptionnellement bien
placé pour fournir, sur la base de ses avantages comparatifs – et des facteurs
négatifs, comme le poids absurde des impôts sur les industries – et les
consommateurs, en général – et la valorisation de la monnaie brésilienne par
rapport au dollar et autres monnaies du commerce international.
Il est vrai qu’il y
a, actuellement, un processus administré de dévaluation du dollar, mais la
valorisation du Real est bien plus importante, étant provoquée par le niveau
excessivement élevé du taux d’intérêt au Brésil, pratiquement le double ou le
triple des moyennes internationales, et cela – tout comme le poids des tributs
– par la faute exclusive du gouvernement, qui dépense toujours plus que les
recettes disponibles. Le déficit budgétaire ainsi que la dette publique sont
relativement en ligne avec les critères de Maastricht (autour de 3% et 75% du
PIB, respectivement), mais leur coût de financement est anormalement élevé, tout
comme l’augmentation des dépenses publiques, qui se fait à un niveaux deux à
trois fois plus élevé que celui du PIB, toujours en dessous de 4% annuels (pour
une expansion des recettes publiques d’au moins 10%).
3) Les ressorts,
internes et externes, de la croissance.
Pour ce qui est des
sources externes de la croissance, cela ne fait pas de doute : le Brésil,
comme une bonne partie de l’Amérique Latine, est devenu dépendant de la demande
chinoise, la plus importante du monde pour tous ses produits d’exportation,
sauf pour les manufacturés, dont la concurrence des produits chinois est
brutale pour l’industrie brésilienne et un peu partout ailleurs dans la région.
La Chine est devenue le premier partenaire commercial du Brésil et c’est elle
qui maintient les prix des commodities
agricoles et minières à de niveaux historiquement élevés (sauf dans la brève
plongée de 2008). Ce qu’il faut remarquer, donc, c’est que le Brésil a été
beaucoup plus « acheté », qu’il n’a vendu à l’extérieur. Une
décroissance chinoise, dans ce cas, risque de mettre à mal l’économie
brésilienne, ainsi que d’autres ailleurs. Même si la Chine n’est pas encore la
locomotive de la croissance mondiale, elle l’est certainement en ce qui
concerne le Brésil et d’autres pays latino-américains (et asiatiques,
vraisemblablement).
En ce qui touche les
sources internes de la croissance brésilienne, il y a tout d’abord l’expansion
du crédit, dont l’importance est passée de moins de 20% du PIB à plus de 35%
dans les années Lula, avec le risque d’endettement des familles pour ne rien dire
des pressions inflationnistes qui sont déjà là : les indicateurs officiels
d’inflation ont tous dépassé le but officiel de 4,5% annuel, touchant déjà le
toit de 6,5%, ce qui pourra précipiter un retour aux temps malheureux de
réalimentation automatique des prix et des salaires.
Mais le Brésil a
aussi reçu des apports significatifs d’investissements étrangers, en partie
pour profiter des intérêts élevés des titres gouvernementaux, mais aussi pour
des projets de nouvelles compagnies, vue l’expansion et l’ampleur naturel du
marché interne. De même, des capitalistes brésiliens ont accéléré leur
mouvements en direction de nouvelles opportunités dans les pays voisins, qui
sont les plus grands consommateurs de produits manufacturés brésiliens (pour le
moment, au moins). Tout cela dit, il faut rappeler que le Brésil, pendant la
phase de haute croissance de l’économie mondiale, entre 2002 et 2008, a vu son
PIB s’accroître en dessous de la moyenne mondiale, et trois fois moins que les
émergeants dynamiques d’Asie. Actuellement, il est dans la moyenne mondiale, et
au dessus des pays avancés – naturellement – mais toujours la moitié moins que
les nouvelles « locomotives » économiques. Cela est toujours dû a ses
taux d’épargne insuffisants pour soutenir un taux d’investissement compatible
avec une croissance à plus de 4 ou 5%, et la raison fondamentale est, encore et
toujours, le crowding-out provoqué
par le gouvernement, soit, la pression des recettes publiques sur les revenus
privés. Si tous les recueillements obligatoires du gouvernement – notamment
liés au travail et à la sécurité sociale, ainsi que d’autres impôts spécifiques
– étaient alloués à l’épargne et à l’investissement, les taux du Brésil
pourraient s’approcher de ceux de certains pays asiatiques.
4) Secteurs forts et
faibles de l'économie brésilienne.
En dépit d’un
formidable effort d’industrialisation dans le dernier demi siècle, le Brésil
est un cas typique du modèle « ricardien », soit le succès par la
spécialisation lié à ses avantages comparatifs notoires, qui sont tous situés
dans le secteur primaire et basés sur des ressources naturelles. En effet,
l’agrobusiness capitaliste est aujourd’hui responsable de la plupart des
recettes en devises dans la balance de payements et concentre beaucoup des innovations
techniques qui font du Brésil un très puissant concurrent international dans la
plupart des produits tropicaux et même tempérés.
Evidemment,
l’industrie est aussi très puissante au Brésil, mais dans les dix dernières
années elle a été victime d’une mauvaise conjonction de facteurs, qu’il faut
séparer par ordre de responsabilité. Tout d’abord, le processus
d’industrialisation a été conduit beaucoup plus avec accent sur le marché
interne qu’en tenant compte des pressions de la compétition étrangère, tenue à
l’écart par une politique commerciale résolument protectionniste : quand
le Brésil – dans le Mercosur, il est vrai – a réduit modérément les tarifs à
l’importation, la concurrence de produits bon marché a commencé a éroder la
confortable situation des industriels brésiliens.
Certes, comme pour
tout autre pays au monde, la concurrence chinoise est implacable, mais cela
n’explique pas tous les problèmes de la perte de vitesse, et d’importance, de
l’industrie au Brésil. D’après les indicateurs de « liberté
économique » dans le monde, la Chine est, économiquement parlant, un pays
plus libre que le Brésil, toujours dirigiste et régulateur à outrance, presque
socialiste en le comparant avec la Chine dans cet aspect. En plus des chaînes
bureaucratiques, l’industriel brésilien se bât contre un niveau d’imposition
fiscale qui est 50% plus élevé de celui enregistré en Chine : plus de 40%,
en moyenne, contre un peu plus de 20% (surtout en charges du travail, mais
aussi un jungle cumulative de tributs qui ne sont pas seulement lourds, mais
aussi exigeants en matière de procédures et déclarations). Il faut ajouter à
cela une infrastructure précaire, des services de communications très chers et
toute sorte d’entraves aux entrepreneurs, comme on peut le constater par les
rapports annuels Doing Business de la Banque Mondiale. Les services associés à
l’industrie sont aussi défaillants ou trop chers, étant donné le peu de
concurrence du fait de la fermeture à l’extérieur.
À tout cela,
s’ajoute le coût du capital, en partie compensé par les emprunts subsidiés de
la Banque Nationale de Développement, mais qui vont de préférence aux plus
grandes compagnies seulement. Beaucoup de micro et petites entreprises restent
dans le secteur informel et ne se bénéficient donc de certaines largesses
gouvernementales à l’industrie, qui existent, mais sont plutôt marquées par un
esprit défensif et frileux de la concurrence étrangère. Finalement, il y a le
problème du taux de change, spécialement défavorable dans les dernières années,
mais cela est aussi dû, en partie, à la politique gouvernementale de taux
d’intérêt élevés, en fonction des constants déficits budgétaires et d’autres
déséquilibres dans les comptes publics.
5) Les grands aléas
pour les prochaines années.
Le plus grand défi
brésilien, actuellement et dans les prochaines années, est celui de résoudre,
en bases permanentes, le déséquilibre fiscal, qui menace de provoquer une crise
domestique, vue la croissance toujours démesurée des dépenses publiques par
rapport à une expansion somme toute très modeste du PIB. Pour cela, le
gouvernement est « obligé » de extraire une fraction toujours
croissante des revenus privés, processus qui a conduit la charge fiscale à
augmenter continuellement depuis les années 1990. Un exemple est donné par les
dépenses avec les serviteurs d’État pendant la période Lula : le coût
total du personnel fédéral est passé de 75 milliards de Reais, en 2002 , à 200
milliards en 2011, soit une augmentation de 166% par rapport à 2002.
À cela s’ajoute une
inégalité frappante entre les revenus du personnel public, de 8.000 Reais en
moyenne, contre seulement 1.500 Reais dans le secteur privé, quand c’est
celui-ci qui produit les richesses et le revenu qui sert à payer les premiers. Le
fait est que le secteur public est en train d’étouffer le secteur privé au
Brésil, et cela constitue le plus grand danger pour son avenir, en plus de
certains problèmes structurels, tous liés à des défaillances dans le
fonctionnement de l’État. Par exemple : il n’est un secret que la qualité
– si le mot s’applique – de l’éducation au Brésil est une des pires au monde,
et les scores des étudiants brésiliens en lecture, sciences et mathématiques
dans les examens internationaux du programme Pisa de l’OCDE se situent toujours aux cinq dernières places, parmi
une cinquantaine d’autres pays.
Cette situation est
terrible pour l’avenir du pays, car le Brésil a déjà accompli sa transition
démographique dès les années 1980 – soit, des taux de croissance, de mortalité
et d’espérance de vie assez satisfaisants – et que le nombre de vieux s’accroît
maintenant à des taux soutenus. Mais le Brésil va disposer encore, pour une
génération à peu près du phénomène connu comme « bonus
démographique », c’est-à-dire, la plus haute proportion de population
active par rapport au nombre de dépendants. Mais, du fait de la qualité
déplorable de son système éducationnel, le Brésil ne va pas accumuler des gains
de productivité suffisants pour augmenter rapidement son revenu moyen par tête,
de manière à pouvoir payer les cotisations sociales et les frais de santé pour
sa population de vieillards d’ici 20 ou 30 ans. Cela sera dramatique sur le
plan économique et social.
6) Les priorités
actuelles de la nouvelle présidence.
Les priorités ne
sont pas différentes de celles d’un ordre du jour normal, de tout gouvernement
désireux de se faire réélire et de disposer du soutien populaire :
croissance économique, augmentation du nombre d’emplois, expansion des revenus,
diminution de la pauvreté, du chômage, de gains de compétitivité
internationale, combat à l’inflation et précaution envers les menaces venant d’une
crise extérieure. En cela, le gouvernement Dilma Rousseff ne se distingue pas
de l’antérieur – d’ailleurs entièrement responsable pour l’élection d’une
personne qui n’avait jamais disputé aucune – ou d’un quelconque autre
gouvernement : il s’agit de conduire les affaires courantes et d’imprimer
sa marque par quelques politiques nouvelles.
Son début,
néanmoins, a été marqué par une espèce d’« héritage maudit », qui est
constitué par l’augmentation irresponsable des dépenses publiques conduite de
manière systématique pendant toute l’administration Lula, à la fin plus encore,
précisément pour pouvoir élire sa dauphine. La présidente est alors obligé de
couper dans le budget, ce qui affecte surtout les services de santé et
d’éducation, ainsi que les investissements publics, déjà très réduits en dehors
de ceux de Petrobras, qui a reçu des apports formidables du Trésor national,
via Banque Nationale de Développement (y compris au moyen des manipulations
comptables, pour cacher l’expansion de l’endettement public).
L’autre problème –
qui n’est pas une priorité du gouvernement, mais auquel il est contraint par
l’opinion publique – et le combat à la corruption dans la sphère
gouvernementale (Exécutif et Législatif, surtout, mais aussi dans le
Judiciaire), qui s’est disséminé énormément avec la tolérance démontrée par
Lula envers se phénomène par ailleurs commun au Brésil, surtout dans le secteur
public. Les ministres déchus jusqu'à présent étaient tous hérités du
gouvernement Lula, mais des nouveaux cas se présentent. Cela est le reflet d’un
système politique sclérosé, qu’il faudrait réformer à fond, mais le gouvernement
n’a pas vraiment un programme de réformes consistantes. La réforme fiscale,
avec un allégement des impôts serait la première à être entreprise, mais il est
douteux que le gouvernement réussisse dans ce domaine ; le plus probable,
d’ailleurs, sera la création d’une nouvelle contribution, cumulative,
soi-disant pour financer les dépenses de santé.
Les priorités
conjoncturelles, imposées en partie du dehors, sont la lutte contre la crise
internationale, qui peut affecter le Brésil par les canaux commercial et
financier, et le maintien de l’activité interne, pour soutenir la croissance et
l’emploi. La croissance exagérée des dépenses publiques est plutôt un problème
pour la société, qui paye la facture, que pour le gouvernement, qui cherche
toujours des nouvelles sources de financement (y compris par des nouveaux
impôts ou au moyen des recettes du pétrole du pré-sel, qui vont tarder encore
quelques années à venir). Le gouvernement continue à travestir le peu
d’efficacité dans la gestion publique au moyen de beaucoup de publicité autour
de quelques programmes officiels d’accélération de croissance (PAC I et PAC
II), ainsi que dans la construction de logements sociaux, même quand l’expérience
précédente n’a pas eu le succès escompté ; en cela aussi, le nouveau
gouvernement ne fait qu’imiter l’antérieur.
Sur le plan
structurel, le gouvernement Dilma veut réduire la pauvreté extrême, aujourd’hui
limité à moins de 16 millions de personnes, selon les statistiques
officielles ; dans ce domaine, il n’y a pas vraiment de nouveauté, sauf
confirmation des programmes de distribution de subsides aux plus pauvres, qui
ont commencé avec une nette inclinaison électorale, pour devenir, selon le
gouvernement, le plus grand programme social au monde. Il se peut qu’il soit
cela, mais il représente aussi une dérivation populiste du Parti des
Travailleurs, qui avait toujours condamné, avant d’arriver au pouvoir, ce genre
de pratique « assistancielle ». Aujourd’hui cela lui garantit
quelques millions de votes, et dans le Brésil arriéré de l’intérieur, le PT
s’est substitué aux anciens oligarques, tout en pratiquant une politique
économique dite « néolibérale » mais la critiquant dans les discours
et documents officiels.
7) Quelles
interactions entre politique économique et politique étrangère ? Comment se
renforcent-elles l'une l'autre ?
De l’aveu même de
ses dirigeants, la politique étrangère n’a pas vraiment changé, si ce n’est
pour une question de style ; certaines inflexions ont été observées dans
la question des droits de l’homme, mais les tests véritables restent encore à
venir. Du reste, la politique tourné vers le Sud doit continuer, tout comme l’accent
mis sur l’intégration sud-américaine, en essayant de faire du Mercosur une
plateforme pour le renforcement de l’Union des Nations Sud-Américaines, une
création de l’administration Lula, même si Hugo Chávez a influencé quelque peu
son contenu et ses institutions. Il est peu probable que la personnalité de la
présidente la pousse à entreprendre les mêmes initiatives dont Lula avait le
goût : sommets avec les leaders africains et arabes, « paix »
dans le Moyen Orient, « bons offices » dans la question nucléaire
iranienne, ou d’autres encore.
Le moment est
d’ailleurs délicat, avec la perspective d’une nouvelle récession ou de croissance
lente dans les principaux marchés, ce qui recommande une bonne coordination
entre les politiques extérieure et économique, précisément. À ce titre, il faut
attendre pour voir si les négociations commerciales multilatérales vont
vraiment reprendre, ce qui est douteux, mais le Brésil, comme beaucoup d’autres
pays, a adopté une politique commerciale plutôt défensive dernièrement, compte
tenu de la perte de compétitivité de ses produits, non seulement dans de
marchés externes, mais dans le marché brésilien lui-même. Cette caractéristique
inquiète beaucoup industriels et technocrates ; les uns et les autres
attribuent les problèmes au taux de change défavorable – et le ministre des
finances s’est référé à une hypothétique « guerre cambiale », en
suggérant qu’elle venait des Etats-Unis, non de la Chine – ou à la
« concurrence prédatrice » de la Chine, maintenant visée par tous. Aucun
responsable gouvernemental ne se réfère à la lourde charge d’impôts ou au rôle
des taux d’intérêt dans la valorisation du Real, et pour cause : ce serait
condamner les pratiques et politiques officielles.
Il est peu probable
que les politiques économiques brésiliennes soient radicalement changées dans
l’avenir prévisible, tout comme il est peu probable que le G20 financier soit
capable de proposer des solutions miracles à la crise actuelle, ou même
simplement d’opérer ce qui justifie son existence : la coordination des
politiques économiques nationales des pays membres. Le Brésil a toujours
insisté, au sein du G20, pour la « réforme des institutions économiques
internationales », en entendant par là l’élargissement des instances de
décision dans les deux organisations de Bretton Woods, en concédant plus de
pouvoir à des pays comme le Brésil. Il est connu que l’un des principaux
obstacles à une réorganisation du pouvoir de vote est constitué par des petits
pays européens, qui ne veulent pas perdre leurs privilèges, qui ne
correspondent plus aux réalités économiques du monde actuel. Or, à la première
opportunité pour que des changements réels soient accomplis, lors de la
désignation du successeur du directeur-gérant du FMI Dominique Strauss-Kahn, le
Brésil a, contradictoirement, choisi d’appuyer la candidate française, au lieu
de soutenir le candidat mexicain, qui pouvait somme toute représenter une
chance de transformation de la structure politique de l’organisation. On peut
se demander, ainsi, si l’interaction entre politique étrangère et politique
économique existe effectivement, et si le Brésil est prêt pour assumer des
nouvelles responsabilités sur le plan mondial.
Dans un autre
chapitre, mais toujours dans ce domaine, le nouveau ministre de la Défense
brésilien, l’ex-ministre des affaires étrangères Celso Amorim, a annoncé – avant
même de prendre la charge du ministère – qu’il avait l’intention de retirer les
troupes brésiliennes de l’opération de stabilisation de l’ONU en Haïti,
la Minustah, vraisemblablement pour des raisons économiques, puisque le même
ministre, quand il était à la tête de l’Itamaraty, imaginait que cette
opération pouvait donner au Brésil le billet d’entrée au Conseil de Sécurité de
l’ONU. Il est vrai que l’Armée brésilienne a appuyé l’engagement en Haïti, mais
quelques centaines des millions de dollars après, elle doit réviser les pertes
et profits de l’opération, surtout dans un moment de coupes budgétaires et de
restrictions sévères aux dépenses de cette force. C’est là encore un exemple
des problèmes de coordination interne entre les secteurs diplomatique et
économique au Brésil.
Paulo Roberto de Almeida
Brasília, 7/09/2011