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domingo, 5 de maio de 2013

Um mentiroso bem sucedido no antiterrorismo - Le Monde

James McCormick, détecteur gadget
Par Christophe Ayad et Eric Albert
Le Monde, 04.05.2013

A Londres,
La défense de James McCormick s'est finalement révélée aussi vide que ses détecteurs d'explosifs. Après trois ans et demi d'enquête de la police du comté de Somerset, le mensonge de ce Britannique de 57 ans a fini par être dévoilé. Jeudi 2 mai, il a été condamné à dix années de prison pour fraude. Mais combien de morts a-t-il sur la conscience ?

Comme tous les bons mensonges, celui de James McCormick était suffisamment énorme pour être crédible. L'homme d'affaires déclarait avoir inventé une technologie révolutionnaire qui permettait de détecter des explosifs dans un rayon d'un kilomètre. Un véritable rêve pour les services de sécurité du monde entier. Il suffisait de tenir dans ses mains un boîtier semblable à un gros allume-gaz, et sa longue antenne, similaire à celle d'un poste de radio, se dirigeait irrésistiblement là où se trouvait la bombe. Mieux encore, l'Advanced Detecting Equipment (ADE), un nom suffisamment abscons pour paraître réaliste, pouvait aussi détecter de la drogue, de l'ivoire, des billets de banque ou toute autre substance, voire des êtres humains.
Le tout avec une simplicité d'utilisation désarçonnante. Il suffisait de mettre un petit morceau du type d'explosif ou du matériau à détecter dans une jarre en verre ; placer un petit autocollant dedans, pour qu'il en absorbe les vapeurs ; coller l'autocollant sur une carte en plastique à glisser dans l'appareil ; et voilà, c'était prêt ! Ne restait plus qu'aux agents de sécurité à se promener, boîtier en main, pour déjouer aisément toute tentative d'assassinat ou de contrebande.

RADIESTHÉSIE
La science derrière ce boîtier révolutionnaire ? "C'est assez similaire à [celle] de la radiesthésie", affirmait sans rire M. McCormick dans un rare entretien qu'il a donné à la BBC en 2009. La radiesthésie ? En clair, le même principe qui se trouve derrière la baguette de sourcier, une croyance sans fondement qui pense pouvoir détecter les radiations. Mais, à 5 000 dollars pièce pour les moins chers, et 40 000 dollars pour les plus sophistiqués, l'ADE en imposait : il n'était pas question de mettre en doute le sérieux de la trouvaille.

Résultat, des services de sécurité du monde entier se sont arraché l'invention. L'Irak, traumatisé par des attentats quotidiens, a été le principal client, suivi par l'Afghanistan, en proie aux attentats-suicides. Le Niger, l'Arabie saoudite, la Géorgie, l'Algérie, la police et l'armée thaïlandaises ont aussi sorti leurs chéquiers, tout comme la Libye de Kadhafi ou les rangers kenyans. Même les Nations unies au Liban se sont équipées, à l'instar de Michel Aoun, dont les gardes du corps usaient de l'ADE avec le plus grand sérieux en 2006. De quoi permettre à M. McCormick de vendre au moins 7 000 appareils, dégageant des bénéfices de plus de 50 millions d'euros.

Avec sa petite moustache grise, son large embonpoint et ses cheveux tirés en arrière, l'homme était tout simplement un charlatan. Ses boîtiers étaient entièrement vides. Dedans, ni pile pour les faire fonctionner ni aucun principe actif. L'antenne n'était reliée à rien. La prétendue carte électronique qu'il fallait glisser dans l'appareil n'était qu'un petit circuit imprimé similaire aux alarmes antivols utilisées dans les magasins.

Inévitablement, des attentats ont eu lieu, sans que les ADE détectent quoi que ce soit. "Votre conduite frauduleuse pour vendre des appareils inutiles simplement pour un énorme profit a apporté un faux sens de sécurité et, selon toute probabilité, a contribué à tuer et blesser des personnes innocentes", a asséné le juge Richard Hone, quand il a lu son verdict. M. McCormick devrait cependant échapper à toute poursuite criminelle, parce qu'il sera très difficile de prouver le lien entre un attentat non évité et la vente de ces équipements.

L'IRAK, PREMIER CLIENT
C'est en Irak que le boîtier a été le plus populaire. Le pays en a acheté pour 45 millions d'euros entre 2008 et 2010. L'armée américaine avait bien donné plusieurs avis défavorables à cet achat, expliquant aux responsables irakiens, avant de quitter le pays, que seuls les chiens dressés à la détection d'explosifs étaient efficaces. En vain. A l'époque, les responsables irakiens voyaient dans l'ADE la panacée à la vague d'attentats sans précédent qu'a connue le pays de 2006 à 2008.

Pour mettre en échec les kamikazes qui sillonnaient Bagdad en voiture à la recherche d'une cible, les autorités, aidées par l'armée américaine, ont mis en place un maillage serré de checkpoints dans la capitale. Chaque policier a sa méthode : l'air concentré ou faussement décontracté, l'un fait ouvrir les fenêtres, l'autre demande que l'on coupe le moteur, voire le téléphone portable, avant de promener le fameux ADE de M. McCormick. Il y a ceux qui déplacent l'appareil et ceux, plus feignants, qui le tiennent à bout de bras, laissant les voitures défiler. En fait, rien ne vibre sauf la main du policier ou son intime conviction, désignant - par instinct ou autosuggestion - les voitures suspectes à une fouille plus poussée, à l'ancienne.

ENQUÊTE OUVERTE EN 2009
Dès 2009, l'inspecteur général du ministère de l'Intérieur irakien, Akil Al-Turehi, a ouvert une enquête. Dix à quinze hauts responsables du pays auraient touché des pots-de-vin pour acquérir des milliers d'exemplaires de l'appareil miraculeux de James McCormick. Trois sont aujourd'hui sous les verrous, dont l'ex-responsable des démineurs de Bagdad, le général Jihad Al-Jabari. Depuis, l'ADE est devenu le symbole du cynisme et de la corruption des dirigeants irakiens. L'appareil, synonyme d'embouteillages, exaspère les automobilistes.

Plus personne n'y croit dans le pays, sauf les policiers qui continuent de l'utiliser, imperturbables. Interrogés lors d'un séjour à Bagdad, début avril, la plupart d'entre eux continuent de nier l'évidence, sans qu'on sache si c'est l'effet d'une fierté mal placée ou du désarroi d'avoir été ainsi bernés par leurs supérieurs. Comment autant de monde a ainsi pu se laisser berner pendant des années ? "C'est dur à croire. M. McCormick était un fraudeur sophistiqué, qui a développé sa tricherie pendant des années. Il était fort à ce jeu-là", répond, laconique, Nigel Rock, le policier britannique qui a mené l'enquête. Il prétendait posséder quatre laboratoires secrets au Royaume-Uni et en Roumanie.

L'homme arborait tous les signes extérieurs du parfait businessman. Ses brochures en papier glacé présentaient les avantages des différents appareils, dans des termes apparemment savants. La vidéo de démonstration ne lésine pas sur les effets spectaculaires : une voiture explose, s'envolant dans les airs au ralenti ; quelques instants plus tard, une maison est déchiquetée par une bombe de grande puissance. "Evitez ça !", clame le slogan, dans une ambiance digne d'un épisode de James Bond.

EFFICACE MÊME SOUS L'EAU
L'aplomb du Britannique impressionne. Dans une vidéo de formation qui se trouve encore sur YouTube, dans laquelle il explique le fonctionnement de l'appareil, l'homme affirme sans ciller que la technologie fonctionne aussi sous l'eau. Selon ses dires, dans la même vidéo, il aurait commencé à mettre au point l'ADE dès 1997. Mais c'est en 2001, après les attentats du World Trade Center, que les ventes ont vraiment décollé. "Les Twin Towers ont inséré la peur dans l'esprit des gens", explique-t-il.

James McCormick saura parfaitement exploiter cette anxiété. Pour mettre au point son engin, il achète aux Etats-Unis des détecteurs de balles de golf. Il transforme à peine ces gadgets à vingt dollars et les revend vingt-cinq fois le prix. Pour cet homme originaire d'une famille modeste de Liverpool, qui a quitté l'école sans autre diplôme que quelques épreuves du brevet des collèges, l'argent coule à flots. La belle vie commence. Il achète pour sa fille des chevaux de dressage. Il roule en Porsche Cayenne. A Bath, il acquiert la maison de l'acteur Nicolas Cage, pour plus de 5 millions d'euros. Dans la campagne verte de l'ouest de l'Angleterre, il se paye une ferme près du charmant village de Taunton, pour près de 2 millions d'euros, où il réside. Sans compter une villa à Chypre, une autre en Floride et un yacht, le Sunseeker. Des photos le montrent au volant de son bolide, en polo blanc, sirotant un verre de vin rouge.

Désormais, la police britannique cherche à confisquer sa fortune. Elle a déjà gelé près de 18 millions d'euros, mais estime qu'une somme équivalente aurait été blanchie via Chypre, le Belize et Beyrouth. La fraude est donc désormais terminée. Mais en Irak, malgré le procès, les détecteurs continuent à être utilisés. "On ne peut pas les abandonner du jour au lendemain, nous confiait début avril à Bagdad l'un des rares policiers à reconnaître qu'ils ne servent à rien. Ce serait avouer qu'on s'est fait avoir. Et puis ils n'empêchent peut-être pas les attentats mais c'est une manière comme une autre de faire des fouilles au hasard."

Christophe Ayad et Eric Albert

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