La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Bruxelles, le 10 décembre.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à Bruxelles, le 10 décembre. JOHN THYS / AFP

« Le jour d’après ne ressemblera pas au jour d’avant », promet-il, la main sur le cœur. Ce jour-là, le 31 mars, Emmanuel Macron rend visite aux salariés de l’usine Kolmi-Hopen, produisant des masques à Saint-Barthélemy-d’Anjou (Maine-et-Loire), près d’Angers. Alors que la première vague de la pandémie de Covid-19 frappe l’Europe, certains pays membres se découvrent, avec stupeur, à court de masques, de médicaments et de matériel médical, en grande partie fabriqués en Asie. Pour répondre à l’inquiétude des Français, le chef de l’Etat s’engage alors : le combat contre le virus sera aussi celui des relocalisations.« Notre priorité est de produire plus sur le sol national pour réduire notre dépendance, martèle-t-il. Nous devons rebâtir notre souveraineté nationale et européenne. » 

Dans l’industrie automobile, l’informatique ou la fabrication de vélos, les usines tricolores ou allemandes se heurtent rapidement au même problème : parce que les frontières se ferment pour endiguer la propagation du coronavirus, certaines pièces indispensables à la production sont bloquées dans l’empire du Milieu. « La pandémie a accéléré une prise de conscience à l’œuvre depuis quelques années : celle de notre trop grande dépendance à la Chine », résume Chloé Ridel, directrice adjointe de l’Institut Rousseau, un think tank de gauche. Les chaînes d’approvisionnement, mondialisées à l’extrême ces dernières décennies pour des raisons de coût, apparaissent soudain comme le maillon faible de l’Europe.

Il n’en fallait guère plus pour relancer le débat sur les délocalisations, récurrent en France, et la nécessité d’une « Europe qui protège ». Celle-ci en fait-elle assez contre la concurrence des pays à bas coût ? Se défend-elle suffisamment face au géant chinois ? Est-elle allée trop loin dans l’ouverture ? Peut-être. Il faut dire que l’Union européenne (UE) est, depuis son origine, l’un des grands promoteurs du libre-échange. « C’est même dans son ADN », rappelle Sébastien Jean, spécialiste du commerce et directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii). A l’après-guerre, c’est pour rendre « matériellement impossible » les conflits entre eux que les pays fondateurs ont bâti un marché commun sans droits de douane, d’abord pour le charbon et l’acier, avant de l’élargir. Puis de défendre les mêmes valeurs à l’extérieur.