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sábado, 3 de novembro de 2018

Une democradure au Bresil? - Olivier Dabène (Sciences Po)

Olivier Dabène est un des "brésiliennistes" français, prof. à Sciences Po.
Je voudrais commenter plus extensivemente, mais je n'ai pas le temps.
Je dirais seulement qu'il se trompe, comme d'ailleurs la plupart des commentateurs étrangers, contaminés par la publicité mensongère du PT et ses sympathisants à l'étranger.
Pas tous les 47 millions de votes pour le "poteaux" de Lula étaient pour le PT ou en défense de la démocratie. Une moitié au moins c'était déjà pour le PT, n'importe lequel serait le fantoche de Lula. Une partie était contre la "menace fasciste", un FakeNews du PT et des "intellectuels" sympathisants.
Ni les 57 millions de votes pour Bolsonaro étaient de droite, fascistes ou conservateurs. Ils voulaient simplement éviter le retour au pouvoir de la mafia du PT.
Il n'y a pas de risque de retour en arrière au Brésil, de dictature, ou "démocradure".
Reste la confusion mentale, d'une part et de l'autre.
C'est la seule chose sure au Brésil.

Paulo Roberto de Almeida
Brasília, 3/11/2018

BRÉSIL, LE SPECTRE D'UNE « DÉMOCRADURE »

Par Olivier Dabène (CERI)

Au lendemain du second tour de la présidentielle, trois Brésil émergent. Pour les 57 millions d’électeurs de Jair Bolsonaro, la radicalité de leur champion est à la hauteur des enjeux. Le pays a besoin d’un vaste coup de balai contre la corruption et de fermeté pour enrayer la violence. Les 47 millions de Brésiliens qui ont voté pour Fernando Haddad ont, quant à eux, souhaité défendre la démocratie tout autant qu’exprimer leur fidélité au Parti des travailleurs (PT).
Reste le Brésil invisible de plus de 40 millions d’électeurs qui soit n’ont pas pris part au vote, soit ont voté blanc ou nul. Cette proportion anormalement élevée traduit un certain désarroi face à une dangereuse polarisation politique.

Comment en est-on arrivé là ?

Le candidat Jair Bolsonaro est parvenu durant sa campagne à incarner la figure de l’outsider antipolitique, alors même qu’il est parlementaire depuis 28 ans. Ses positionnements radicaux l’ont, il est vrai, longtemps marginalisé au sein de la classe politique, lui permettant d’incarner une alternative au monde corrompu des professionnels de la politique. Bolsonaro a aussi tiré profit de son passé militaire pour donner du crédit à ses propositions musclées en matière de lutte contre la violence et l’insécurité. Il a, enfin, capitalisé sur la frustration générée par la lenteur de la reprise économique.
La radicalité de Bolsonaro est proportionnelle au dégoût que suscite l’ensemble de la classe politique compromise dans des scandales de corruption. L’attachement à la démocratie, en baisse dans les enquêtes d’opinion, n’a pas dissuadé les électeurs de voter pour un nostalgique de la dictature. Pour certains, la haine contre le Parti des travailleurs (PT, au pouvoir entre 2002 et 2016), a motivé un vote de rejet dont Bolsonaro a bénéficié.
Ces élections ont ainsi clôturé une séquence marquée par une stratégie de revanche de la droite défaite dans les urnes à quatre reprises par le PT (en 2002, 2006, 2010, 2014).
Les mobilisations sociales de juin 2013 (mouvement étudiant pour la gratuité des transports publics), ont été mal gérées par le PT, qui s’est coupé de la jeunesse. Elles ont aussi été récupérées par la droite qui a cru pouvoir en faire un argument de campagne électorale.
Malgré tout, aux élections présidentielles de 2014, le PT emporte sa quatrième victoire consécutive. Les mobilisations sociales orchestrées par la droite en 2014 témoignent de la volonté d’en découdre. Parallèlement, les premières révélations de la vaste enquête contre la corruption lancée en 2014 (Lava Jato) secouent l’ensemble de la classe politique. Pour autant, la justice se focalise sur le Parti des travailleurs et les médias amplifient ce discrédit qui frappe le parti de Lula. En 2016, la présidente Dilma Rousseff est destituée dans des conditions douteuses pour « crime de responsabilité fiscale ».
En 2018, la campagne électorale de Bolsonaro séduit trois types d’électeurs :
  • un électorat jeune, urbain et diplômé opte pour un vote utile afin d’écarter le PT ;
  • un électorat populaire est séduit par le discours sécuritaire ;
  • et un électorat proche des Églises évangéliques ne retient que la défense de valeurs néo-conservatrices.
Tous sont adeptes de WhatsApp qui véhicule une propagande extrémiste au contenu haineux.

Le risque d’une dérive autoritaire

La dérive autoritaire du Brésil a commencé sur deux registres. Au plan institutionnel, la politisation de la justice et le recours abusif à la procédure de destitution contre Dilma Rousseff ont rompu l’équilibre des pouvoirs. Sur le plan des comportements, Bolsonaro durant sa campagne a trahi l’esprit de la démocratie en présentant son opposant comme un ennemi à éliminer. Ses évocations nostalgiques de la période de dictature (1964-1985) ont d’ailleurs valeur d’aveu.
La démocratie peut certes fonctionner en l’absence de convictions démocratiques d’un président de la République, mais elle reste alors subordonnée à ses actes. Et en la matière, Bolsonaro inspire toutes les craintes.
Ainsi, il n’est pas déraisonnable de penser que les opposants à Bolsonaro vont tenter de le déstabiliser dans la rue, ce qui pourrait occasionner des réactions musclées de la part des forces de police galvanisées par le soutien du Président. Toutes les options sont alors ouvertes, du retour rapide au calme à un engrenage à la vénézuélienne compromettant les libertés publiques. La démocratie brésilienne deviendrait alors illibérale.
Il n’est pas non illogique d’imaginer les conséquences dramatiques de la politique répressive que Bolsonaro annonce pour ramener la paix par la violence dans les quartiers affectés. Le recours aux forces armées a déjà été testé au Brésil et les politiques de mano dura ont augmenté la violence partout en Amérique latine. La démocratie brésilienne deviendrait militarisée, une « démocradure » encore plus violence.

Un axe conservateur émerge en Amérique du Sud

On peut enfin spéculer sans grand risque sur la volonté de Bolsonaro de se faire réélire dans quatre ans. Son utilisation massive des fake news durant sa campagne 2018, montre à quel point il ne reculera devant rien pour rendre la victoire de l’opposition impossible. Le régime relèvera alors de l’autoritarisme électoral, comme le Venezuela, la Turquie ou la Russie.
Ces risques de dérive autoritaire peuvent être accentués par les soutiens internationaux dont il pourra se targuer.
L’admiration de Bolsonaro pour les États-Unis de Trump, pour commencer, ne fait pas de doute. Bolsonaro cherchera à établir un lien privilégié avec l’administration républicaine, afin de faire de son pays un relais d’influence dans la région. Il soutiendra par ailleurs les positions de Trump, notamment au Moyen-Orient (transfert de la capitale à Jérusalem).
En Amérique du Sud, l’émergence d’un axe conservateur comprenant l’Argentine, le Chili et la Colombie, bouleverse la géopolitique régionale. Sa portée sera toutefois atténuée par l’accent placé par le Brésil de Bolsonaro sur la défense d’intérêts nationaux (lutte contre le narcotrafic). L’opposition agressive au Venezuela devrait être confirmée, mais sans aller jusqu’à une action militaire concertée avec la Colombie et les États-Unis, envisagée un temps durant la campagne.

Des capacités de résistance au sein de la société civile

Dès le soir de la défaite du candidat du PT, le Brésil mobilisé pour la défense de la démocratie est entré en résistance. Nul doute que les organisations de la société civile brésilienne opposées à Bolsonaro exerceront une vigilance de tous les instants et qu’elles dénonceront vigoureusement les éventuelles dérives évoquées précédemment.
Elles pourront compter pour ce faire sur le soutien de certaines institutions comme le Tribunal suprême fédéral, qui est déjà intervenu durant la campagne pour défendre la liberté de conscience et d’expression des Universités. Ce Tribunal aura à juger de la conformité à la Constitution de certaines réformes annoncées par Bolsonaro. Dans certains cas comme la réduction de la responsabilité pénale à 16 ans ou la privatisation d’entreprises publiques, les débats promettent d’être acharnés.
La période qui s’ouvre constituera sans nul doute un test pour l’État de droit brésilien comme pour la qualité de sa démocratie.The Conversation
Olivier Dabène, professeur des universités, président de l’Observatoire politique de l’Amérique latine et des Caraïbes (OPALC) du Centre de recherches internationales de Sciences Po (CERI).
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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