Qui, du président vénézuélien, Hugo Chavez, ou de son rival, Henrique Capriles Radonski, va remporter l'élection du dimanche 7 octobre ? "Plus que la présidence de la République, les deux hommes se disputent le contrôle de l'entreprise pétrolière PDVSA", considère l'ingénieur vénézuélien José Bruno. Neuvième producteur de brut mondial et cinquième exportateur, le Venezuela vit de la rente pétrolière. Elle fournit 95 % des recettes à l'exportation et la moitié du budget de l'Etat.
Au pouvoir depuis 1999, M. Chavez a mis PDVSA (Petroleos de Venezuela SA) au service de la "révolution bolivarienne". L'entreprise publique finance directement les programmes sociaux mis en place en matière d'éducation, de santé, d'alimentation, et maintenant de logement. "PDVSA est rouge, bien rouge", affirmait en 2008 son président, Rafael Ramirez, également ministre de l'énergie et des mines. La formule a fait date.
L'opposition juge catastrophique la politisation de l'entreprise et l'élargissement de ses fonctions.
"Pressée comme un citron par la révolution bolivarienne, PDVSA ne parvient plus à assurer la maintenance de ses installations, ni à investir pour assurer sa compétitivité sur le long terme. Alors qu'elle reçoit des ressources phénoménales – évaluées à plus de 100 milliards de dollars [77 milliards d'euros] par an, elle n'a cessé de s'endetter", explique M. Bruno. Et de rappeler que, le 25 août, une explosion à la raffinerie d'Amuay, à l'ouest du pays, a causé la mort de 42 personnes.
"FAIRE DE PDVSA UNE ENTREPRISE EFFICACE ET BIEN GÉRÉE"
M. Bruno a perdu son poste à PDVSA pour avoir participé à la grande grève de 2002 qui, orchestrée par l'opposition, prétendait défendre l'autonomie de l'entreprise publique. Le mouvement a permis au président Chavez de prendre le contrôle de PDVSA. Dix-huit mille employés, la moitié des effectifs de l'époque, avaient alors été licenciés.
"PDVSA doit produire du pétrole, c'est tout. Pas des poulets ni des HLM", résumait au Monde le candidat de l'opposition, Henrique Capriles, lors d'un de ses déplacements en province. Il jure qu'il n'a pas l'intention de privatiser l'entreprise publique, créée en 1976 à la suite de la nationalisation du pétrole. Son programme ? "Faire de PDVSA une entreprise efficace et bien gérée."
Pourtant, les 105 000 employés que compte désormais PDVSA n'auraient pas à craindre des licenciements. "J'ai besoin de tous les travailleurs de PDVSA, assure M. Capriles. Mais j'ai besoin d'eux à leur poste de travail, pas en casquette rouge en train de manifester leur soutien à la révolution."
Comme M. Chavez, le candidat de l'opposition veut doubler la production de brut (3 à 6 millions de barils par jour) d'ici à 2019. Et, comme le chef de l'Etat, M. Capriles promet d'utiliser les fonds ainsi obtenus pour développer l'agriculture et industrialiser le pays. "Semer le pétrole", tous les gouvernements vénézuéliens en ont eu l'ambition.
"Grâce aux phénoménales ressources en pétrole de la "Ceinture de l'Orénoque", PDVSA reste une entreprise solide", juge, pour sa part, José Bodas, secrétaire général de la Fédération unitaire des travailleurs du pétrole. Que PDVSA soit sollicitée pour financer la politique sociale du gouvernement ne le choque pas. "Promue par l'ONU et la Banque mondiale, la responsabilité sociale est pratiquée aujourd'hui par toutes les grandes entreprises privées ou publiques", justifie le dirigeant syndical.
LES ETATS-UNIS ABSORBENT 75 % DES EXPORTATIONS DE BRUT
Employé de PDVSA depuis vingt-deux ans, il partage sur un point l'analyse de l'opposition : "La nouvelle technocratie est rouge, bien rouge, mais largement incompétente sur le plan technique et incapable en matière de gestion." Selon le dirigeant syndical, PDVSA est un patron comme un autre, "avide de bénéfices, qui tente par tous les moyens de limiter les droits des travailleurs, qui sont rouges, eux aussi, mais pas idiots".
A l'en croire, M. Chavez n'a pas changé le modèle d'exploitation du pétrole. "Il a maintenu les entreprises mixtes, avec une participation de 60 % pour PDVSA et de 40 % pour les entreprises étrangères, explique M. Bodas. Peu importe qu'elles soient aux mains des Américains, des Chinois ou des Biélorusses, il y a atteinte à la souveraineté nationale."
Les Etats-Unis, qui absorbent 75 % des exportations vénézuéliennes de brut, restent le premier partenaire commercial du pays. Et, par le biais de l'entreprise Chevron, un gros investisseur. Ils doivent redevenir un "allié privilégié", juge M. Capriles. Mais le candidat de l'opposition admet que "la diversification des partenariats engagée par Hugo Chavez n'est pas complètement négative". Les contrats signés par PDVSA avec les alliés du gouvernement vénézuélien, de la Chine à l'Iran, en passant par la Russie et le Brésil, seront donc, affirme-t-il, révisés "au cas par cas".
Outre Cuba, plusieurs pays d'Amérique latine et des Caraïbes bénéficient, pour l'acquisition du pétrole vénézuélien, de conditions de financement très favorables, crédits à taux réduits ou paiements en espèces. En cas de victoire à l'élection présidentielle, M. Capriles entend mettre fin à "toutes ces largesses socialistes".
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